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Lutte climatique : la France en retrait à la COP26

La France s’est finalement associée à la coalition internationale qui s’engage à ne plus financer d’ici fin 2022 de projets liés aux énergies fossiles à l’étranger. Mais elle a perdu son « leadership » dans la lutte climatique.

Le 12/11/2021 par Vincent Rondreux
La France s'est fait doubler par le Royaume-Uni six ans après la COP21 en matière de lutte climatique.
La France s'est fait doubler par le Royaume-Uni six ans après la COP21 en matière de lutte climatique. (Crédit : Flickr/Andrew Parsons / No 10 Downing) Streetk)
La France s'est fait doubler par le Royaume-Uni six ans après la COP21 en matière de lutte climatique. (Crédit : Flickr/Andrew Parsons / No 10 Downing) Streetk)

Si le Président Emmanuel Macron s’est présenté en fer de lance de la lutte climatique, lors de son discours en ouverture de la COP26, la France s’est visiblement fait doubler par le Royaume-Uni six ans après la COP21 et son « historique » accord de Paris. Alors que l’hôte de la COP26 a multiplié les initiatives (annonces, accords, interventions diverses) durant deux semaines, la France est restée en arrière.

Elle est certes présente dans le pacte Beyond Oil and Gas Alliance annonçant la fin progressive de la production de pétrole et de gaz (sans date). Mais elle est absente de l’accord visant à ce que toutes les voitures neuves vendues soient « à zéro émission dans le monde d’ici à 2040″. Elle a également boudé jusqu’au dernier jour la coalition de pays qui se sont engagés la semaine passée à ne plus financer les projets d’exploitation d’énergies fossiles à l’étranger dès la fin 2022 (sauf s’ils emploient des techniques de capture-stockage de CO2). Avant de se rattraper in-extremis.

« Nous avons pris le temps d’expertiser le texte », a justifié la ministre de Transition écologique Barbara Pompili. « La signature de cet accord, c’est une décision de cohérence pour la France qui a toujours été parmi les pays ambitieux pour le climat », estime-t-elle. Jusqu’alors, le calendrier français était de mettre fin aux financements internationaux des projets pétroliers en 2025 et des projets gaziers en 2035.

France : 9,3 milliards d’euros de financements exports aux énergies fossiles en 10 ans

La position de la France n’était en fait pas tenable, estiment les observateurs. D’une part, l’Agence française de développement (AFD) avait elle rejoint cet accord. D’autre part, la France avait lancé au printemps avec le Royaume-Uni, la Suède, l’Allemagne, le Danemark, l’Espagne et les Pays-Bas, une coalition visant déjà à supprimer les aides publiques à l’export pour les projets liés au charbon, au pétrole et au gaz. Coalition baptisée « Export Finance for Future », sans date contraignante.

Les Amis de la Terre, Oxfam France et 350.org jugeaient que cette position ambiguë donnait la possibilité de poursuivre le soutien de financements par le biais de l’agence de crédits à l’exportation de l’État, BPI France Assurance Export. Les ONG ont donc salué la décision de la France de rejoindre la nouvelle coalition formée à la COP26. Une coalition qui regroupe désormais 33 pays.

« Au total, cela pourrait rediriger chaque année 24,1 milliards de dollars des énergies fossiles vers la transition et les énergies propres », se félicitent-elles. « Cela correspond à 38 % des financements publics accordés aux énergies fossiles par les pays et banques de développement du G20 entre 2018 et 2020 ». Et d’ajouter : « Entre 2009 et 2019, la France a accordé 9,3 milliards d’euros de financements exports aux énergies fossiles ».

Les Amis de la Terre, Oxfam France et 350.org promettent maintenant de rester vigilantes « à la bonne mise en œuvre de cette déclaration et appellent Emmanuel Macron à agir dès aujourd’hui, en refusant notamment officiellement de soutenir le méga-projet gazier de Total en Arctique ».

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Lutte climatique et nucléaire : un sujet qui divise l’Union européenne

Enfin, la France apparaît également en retrait du fait de ses résultats dans la lutte contre le réchauffement planétaire. Peu avant la COP26, le tribunal administratif de Paris l’a enjoint de réparer les conséquences de « sa carence en matière de lutte contre le changement climatique« , pour ne pas avoir respecté son premier budget carbone (2015-2018). En plus, elle est en retard sur sa feuille de route à l’horizon 2028 pour le développement des énergies renouvelables. En parallèle, elle annonce une relance du nucléaire du fait qu’il est « décarboné ».

Mais là encore problème. La Commission européenne prépare actuellement une liste des énergies vertueuses pour le climat, appelée « taxonomie verte ». Ces énergies seront soutenues financièrement. Pendant la COP26, l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark, le Luxembourg et l’Espagne ont fait une déclaration commune pour expliquer que le nucléaire était « incompatible » avec « l’intégrité, la crédibilité et donc l’utilité » de cette liste. Peu avant la COP26, la France et neuf autres États avaient eux publié une tribune pour soutenir le nucléaire. Un sujet qui divise donc l’Union européenne.

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